Anne-Sophie, Whisky Lady et spiritourisme

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Qui a dit que le Whisky était une affaire d’homme ? Anne-Sophie, jeune blogueuse et étudiante à Toulouse en connait un rayon sur le domaine et c’est une véritable passionnée de ce spiritueux. Elle a gentiment accepté de répondre à nos quelques questions et vous allez voir que ses réponses donnent envie de faire un petit détour dans une distillerie.

Anne-Sophie, peux-tu nous parler un peu de toi et de ton blog ?

Alors voilà, je m’appelle Anne-Sophie, j’approche dangereusement du quart de siècle et je suis actuellement en train de finir un master de management touristique à Toulouse. J’ai également eu l’occasion de passer pas mal de temps outre-Manche, que ce soit du côté de l’Angleterre où j’ai vécu pendant un temps, mais également du côté nord de la frontière, à Edimbourg, ville dont je suis tombée éperdument amoureuse en quelques mois. En ce qui concerne mon blog, The Whisky Lady, il s’agissait pour moi d’allier mes deux passions : les spiritueux (et plus particulièrement le whisky) et les voyages, au sein d’un espace digital, volontairement épuré. Le monde du whisky est malheureusement souvent perçu comme un univers très codifié et vieillissant, j’essaye donc, à mon petit niveau, d’y apporter une touche à la fois jeune et féminine, et croyez-moi, ce n’est pas chose facile ! J’aime à décrire mon blog comme un “guide touristique spirituel”. Cependant, celui-ci est encore très jeune, et devrait évoluer dans les prochains mois avec de nouvelles rubriques que je suis impatiente de dévoiler ainsi que peut-être une version française ! Stay tuned donc 😉

En bonne connaisseuse des spiritueux, peux-tu nous parler des régions françaises les plus productrices dans ce domaine ? Produit-on des spiritueux dans la région toulousaine ?

Tout d’abord, la France propose une offre d’une diversité incroyable en matière de spiritueux, du Cognac à la chartreuse en passant par les liqueurs de fruits, l’armagnac ou encore le whisky et la vodka ! Nous avons la chance de vivre dans un pays possédant un savoir-faire multiséculaire et une réputation internationale en termes de gastronomie et de produits d’exception, et les spiritueux font partie intégrante de cette tradition. Maintenant, malgré la vision que l’on peut en avoir, il faut savoir que c’est un secteur qui ne cesse de se réinventer, tout particulièrement depuis quelques années, via le boom du mouvement “craft” venu des Etats-Unis et de l’univers de la bière. Evidemment, certaines régions sont plus actives et/ou plus réputées que d’autres en France, mais 23 régions, y compris des départements d’outre-mer, produisent des spiritueux. En ce qui concerne le whisky français, on parlera souvent de la Bretagne et de l’Alsace, qui ont d’ailleurs récemment obtenu une AOP, et donc un réel statut de “régions du whisky“. La région toulousaine ne manque pas à l’appel puisque la distillerie Castan, produit la gamme de whisky Vilanova, récemment primée ! Le blend de Black Mountain Compagnie, bien que produit un peu plus à l’est, dans le Languedoc, s’est vu quant à lui remettre le titre de meilleur blend européen lors des derniers World Whisky Awards il y a quelques semaines à Londres. En plus d’une offre variée, cela prouve donc bien la qualité de nos whiskies français !

Y-a-t-il un savoir-faire particulier, en France, différent de ceux des autres pays comme l’Angleterre ou l’Irlande ?

Tout à fait, comme je le disais tout à l’heure, la France possède une offre extrêmement variée, plus d’une quarantaine de familles de spiritueux ! L’Ecosse ou l’Irlande ne possèdent pas une telle diversité. Certes ce sont des pays synonymes de savoir-faire, d’histoire et de traditions, qui ont su associer un produit à un territoire. Cependant, la tradition spiritueuse française est l’une des plus riches au monde, le pays a donc développé un savoir-faire unique et souvent multiple. Je crois que ce n’est pas pour rien que des personnes viennent du monde entier pour visiter les distilleries de calvados normandes ou celles de Cognac. De nombreux professionnels viennent y chercher un savoir-faire d’exception, qu’ils essayent souvent par la suite d’adapter à leur production. J’ai par exemple été contactée par Chip Tate en début d’année, fondateur de la distillerie américaine Balcones et qui aujourd’hui a décidé de créer une nouvelle affaire au Texas, pour l’escorter lors d’un voyage d’une semaine en France à la découverte des procédés de fabrication “à la française”. Cela prouve bien que la France est dotée d’un savoir-faire particulier, unique au monde, acquis grâce à un patrimoine gastronomique riche et complexe, tout comme ses spiritueux !

As-tu déjà visité des distilleries ? Qu’en as-tu pensé ? J’imagine que tu as plus d’une anecdote dans ton sac. En as-tu une en particulier à nous raconter ?

Evidemment, j’ai eu l’occasion de visiter pas mal de distilleries, qui sont toutes très différentes les unes des autres ! On passe rapidement d’une grosse machine touristique telle que Glenturret et sa célèbre “Famous Grouse Experience” à une distillerie plus intimiste à la gestion familiale comme la toute nouvelle Cotswolds Distillery, située dans la région d’Oxford en Angleterre. Je garde toujours un très bon souvenir de mes visites en distillerie, tout d’abord parce qu’il s’agit toujours de lieux emprunts d’une certaine “aura” aux seins desquels le produit est roi. Certes, certains éléments reviennent inévitablement mais chaque visite reste unique. Ce que j’apprécie particulièrement lors d’une visite de distillerie, c’est pouvoir être au cœur de la production, pouvoir approcher, voire toucher la matière première. Vous avez déjà plongé la main dans un panier d’orge ou touché le cuivre d’un alambic ? Ce sont ces petites expériences sensorielles qui transforment une visite d’entreprise banale en une expérience sensorielle unique ! Evidemment, la dégustation est un passage indispensable et souvent le “climax” de toute visite de distillerie. Pouvoir goûter un produit directement sur son lieu de production lui donne bien souvent une tout autre dimension ! Sans compter les nectars uniques que vous ne pourrez trouver parfois qu’aux seins des distilleriesLes distilleries sont en réalité tellement différentes qu’il serait réducteur de s’arrêter sur un cas en particulier, pour moi, toutes méritent d’être visitées !

As-tu noté des différences dans les parcours de visites entre les distilleries françaises et les étrangères ? Que peut-on apprendre d’eux ?

Dans certains pays comme l’Ecosse ou l’Irlande, ces visites sont des incontournables de l’offre touristique. En France, nous accusons quelques dysfonctionnements à ce niveau-là. Malgré certaines distilleries proposant une expérience visiteur de qualité, beaucoup ne mettent pas les moyens nécessaires au développement d’une véritable offre touristique, alors qu’elles auraient beaucoup à y gagner ! Certaines encore, perçoivent les visites uniquement comme un moyen de vendre plus de produits. Les choses sont donc souvent faites à l’envers, pour de mauvaises raisons. Cependant, tout n’est pas tout noir, et loin de là ! Certaines maisons célèbres se démarquent, comme par exemple la maison Cointreau qui a su développer une expérience visiteur unique et particulièrement réussie !

Je pense malgré tout qu’il faudrait réussir à développer plus de produits “intégrés” en France, proposant à la fois hébergement et/ou restauration au sein des distilleries, à l’image d’établissements étrangers comme Bowmore, Ardbeg, Bushmills ou encore la distillerie australienne de Nant.

Qu’apprécies-tu le plus dans la visite d’entreprise ?

Comme je le disais tout à l’heure, ce que j’aime lors d’une visite d’entreprise, c’est pouvoir être au cœur de la production, ce qui permet de voir le produit différemment et d’en appréhender tous les aspects. J’aime connaître l’histoire et les petites anecdotes quant à la genèse et au procédé de fabrication d’un produit. Ce que j’apprécie également, en plus de l’aspect “storytelling” de la visite d’entreprise, c’est l’expérience multi-sensorielle qui s’y rattache : sentir, toucher, goûter…

Je crois savoir que dans le cadre de tes études, tu réalises un mémoire sur le tourisme de découverte de nos chères boissons spiritueuses françaises. Peux-tu nous en dire un peu plus ? Quelles sont tes plus grosses découvertes ?

Tout à fait, il s’agit de deux mémoires différents pour être plus précise. J’ai eu l’occasion l’an dernier de travailler sur un sujet assez spécifique, à savoir, comment l’industrie écossaise du tourisme de découverte du whisky pouvait s’adapter aux nouvelles demandes provenant des clientèles émergentes, et plus particulièrement des classes moyennes chinoises (oui, tout un programme !). La construction de ce travail de recherche m’a permis de m’entretenir avec de nombreux acteurs du secteur, et s’est révélée très enrichissante, à la fois personnellement et professionnellement. Cette année, je me dirige vers quelque chose de plus concret, il s’agira de mettre en place une stratégie de mise en tourisme au sein d’une distillerie récente. Un challenge auquel il me tarde de m’attaquer ces prochains mois ! Ces recherches m’ont permis de découvrir énormément de choses, mais ce que j’ai vraiment adoré, c’est l’aspect sociologique et les différentes façons d’appréhender les spiritueux à travers le monde. Le secteur du whisky en Chine, est un monde en pleine effervescence et totalement en contradiction avec la vision occidentale de ce spiritueux. Il s’agit d’une boisson dite “sociale” et conviviale, qu’on n’hésite pas à mélanger, par exemple avec du thé vert, ce qui est bien souvent considéré comme un sacrilège parmi les puristes !

La visite d’entreprise, sexy demain ? Que dirais-tu aux personnes qui n’ont encore jamais visité une distillerie ?

Sexy demain, mais déjà sexy aujourd’hui ! Ce que je dirais à quelqu’un n’ayant jamais visité une distillerie ? Qu’est-ce que tu fais encore devant ton ordinateur ?! Merci Anne-Sophie !

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